Vente immobilière : « marchand de biens » et conséquences fiscales !
Publié le 12 Sep 2023
Temps de lecture : 4mn
Fiscalité
Vous êtes propriétaire de plusieurs biens immobiliers que vous souhaitez revendre à plus ou moins brève échéance.
Prenez garde à ce que l’administration fiscale ne vous qualifie pas de « marchand de biens ». Pourquoi ? Parce que les conséquences fiscales d’une telle qualification seront loin d’être neutres… Explications.
Qu’est-ce qu’un marchand de biens ?
La notion de « marchand de biens » est une terminologie fiscale employée par l’administration pour désigner toutes les personnes qui achètent, habituellement, en leur nom et en vue de les revendre, des immeubles, des fonds de commerce, des actions ou parts de sociétés immobilières, etc.
Cette qualification s’applique aux particuliers, mais pas seulement…
Si le juge de l’impôt a pu venir rappeler, à de nombreuses reprises, qu’un orthopédiste, un charcutier, un buraliste, pouvaient être qualifiés de « marchands de biens » au regard des opérations d’achat / revente immobilières réalisées, les sociétés ne sont pas épargnées.
Dès lors qu’elles aussi se livrent à des opérations d’achat / revente de biens immobiliers, de fonds de commerce, etc., elles peuvent, toutes conditions par ailleurs remplies, se voir qualifiées de « marchand de biens ».
Quelles sont ces conditions justement ?
Elles sont au nombre de 3 et doivent être simultanément remplies :
- la personne visée doit réaliser des transactions immobilières de manière habituelle, les achats ou les souscriptions devant être réalisés avec l’intention de revendre : la personne doit donc avoir une « intention spéculative » ;
- les opérations doivent consister en des achats (ou des souscriptions) suivis de ventes ;
- les opérations d’achat / revente doivent porter sur des biens limitativement énumérés par la loi : immeubles, fonds de commerce, actions ou parts de sociétés immobilières, ainsi que les droits immobiliers et mobiliers qui s’y rapportent.
1re condition : habitude et intention spéculative
La notion « d’habitude », présente dans la 1re condition n’est pas, en tant que telle, définie par la loi. En cas de contrôle, une appréciation au cas par cas sera réalisée par l’administration fiscale tenant compte, soit de la pluralité des ventes réalisées, soit de l’activité présente du vendeur, soit de son activité passée, etc.
En plus du caractère habituel des opérations, il faut également tenir compte de l’intention spéculative du vendeur.
Comme pour la notion « d’habitude », l’intention de revendre sera appréciée en fonction des circonstances propres à chaque affaire (court délai entre l’achat et la revente, montant des bénéfices réalisés, fréquence et pluralité des opérations, etc.).
Précisons tout de même que l’intention spéculative s’apprécie au moment de l’achat (ou de la souscription) et non au moment de la revente. En cas de litige, l’administration et le juge chercheront donc à connaître la nature de vos intentions au moment où vous avez vous-même acheté le bien immobilier.
2e condition : transactions d’achat / revente
L’administration fiscale a une appréciation extensive de « l’achat / revente ». Pour elle, il s’agit de toutes les opérations ayant pour objet de provoquer un transfert de propriété (achat, apports en société, remises à l’échange, etc.)
Attention
S’il est très clair que les biens transmis par voie de succession ne sont pas concernés, il n’en va pas tout à fait de même des transferts de propriété résultant d’une donation.
Les « simples » donations immobilières, en effet, ne sont pas opposables à l’administration. Concrètement, cela signifie qu’en présence d’un tel acte l’administration pourra soit :
- admettre l’existence de la donation et donc, choisir de ne pas appliquer le régime des marchands de biens ;
- écarter cette donation et considérer qu’il s’agit bien d’une opération d’achat / revente passible du régime des marchands de biens.
Marchand de biens immobiliers : quelles conséquences fiscales ?
Au regard de la réglementation fiscale, les marchands de biens sont des « professionnels » de l’immobilier et doivent donc être taxés comme tel.
Plus simplement, les profits tirés par un marchand de biens de son activité doivent être déclarés et imposés à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC), sans pouvoir relever du régime du micro-BIC.
Cette imposition des gains en tant que résultat ordinaire résulte du fait que pour un marchand de biens, le bien immobilier cédé n’est pas considéré comme un élément d’actif, mais comme du « stock ». Or le gain réalisé à l’occasion de la vente d’un élément de stock doit être soumis à l’impôt dans les conditions de droit commun, sans pouvoir bénéficier du régime des plus-value professionnelles.
À toutes fins utiles, notez que les gains réalisés par une société civile qualifiée de « marchand de biens », qui exerce par conséquent une activité de nature commerciale, seront soumis à l’impôt sur les sociétés et non pas à l’impôt sur le revenu.
Sources :
- Article du 35 du Code général des impôts
- BOI-BIC-CHAMP-20-10-10
- BOI-BIC-CHAMP-20-10-40
- Arrêt du Conseil d’État du 13 juin 1979, n° 10962
- Arrêt du Conseil d’État du 26 juillet 1991, n° 79551
- Arrêt du Conseil d’État du 13 janvier 1992, n° 72570
- Arrêt du Conseil d’État du 2 juin 2006, n° 266507
- Arrêt de la cour administrative d’appel de Douai du 9 octobre 2018 n° 16DA02282
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