Première levée de fonds d’une startup : les conditions indispensables à sa réussite
Publié le 13 Déc 2024
Temps de lecture : 6mn
La réalisation d’une première levée de fonds par une startup requiert d’en maîtriser tant les aspects opérationnels que les modalités juridiques. Définition du projet, recherche d’investisseurs, formalisation des engagements dans un cadre juridique solide, autant d’étapes structurantes qui joueront un rôle clé dans la réussite de cette première opération.
Nous explorerons dans cet article les conditions juridiques, financières et stratégiques pour optimiser cette étape cruciale dans le développement d’une entreprise.
Première levée de fonds : auprès de qui ?
La première levée de fonds (aussi appelée « pre-seed » ou « seed funding »), correspond souvent à la phase qui permettra à l’entreprise de financer les premiers développements de sa solution et ses premières démarches commerciales en vue de valider son concept (POC ou « Proof Of Concept »).
3 grandes solutions sont envisageables :
1- Financements dilutifs
Il s’agit d’ouvrir votre capital à des investisseurs extérieurs, ce qui entraîne une dilution de la part des fondateurs au capital. Ces financements dilutifs peuvent prendre les formes suivantes :
- le financement en « love money », qui consiste à obtenir des fonds auprès d’amis ou de membres de sa famille ;
- la levée de fonds auprès de business angels ou de fonds de capital-risque, qui implique la présence au capital de tiers et, en général, la signature d’un pacte d’actionnaires pouvant être contraignant ;
- le financement participatif ou « crowdfunding », qui consiste à collecter des fonds auprès d’un grand nombre d’investisseurs via des plateformes en ligne. Le plus souvent, cela s’effectue sous forme de participation au capital (on parle de « crowdequity ») auprès de particuliers et pour des montants relativement limités.
2 – Financements non-dilutifs (souvent liés à la réalisation préalable d’une opération de financement dilutif)
Ici, il s’agit de financements souvent liés à la réalisation préalable d’une opération de financement dilutif :
- le financement bancaire sous forme de prêts, qui suppose le plus souvent de pouvoir démontrer aux banques que la société a passé la preuve de concept et génère un certain chiffre d’affaires auprès de clients ;
- les prêts et avances remboursables qu’il est possible d’obtenir auprès de réseaux spécialisés d’accompagnement des entreprises, souvent obligatoirement adossées à des prêts bancaires ;
- les subventions et aides publiques auprès d’organismes publics ou parapublics qui visent à soutenir des projets innovants.
3 – Se financer, sans levée de fonds, vos options
Au-delà de ces solutions, il existe toujours la possibilité pour une startup de se financer sans levée des fonds auprès de tiers : il s’agit du développement dit en « bootstrap ».
C’est un autofinancement de la startup par lequel les fondateurs assument seuls l’ensemble des phases initiales du projet, se focalisant sur la génération rapide de chiffres d’affaires et l’atteinte de la rentabilité, ainsi que sur la maîtrise des dépenses, la croissance de l’activité ayant vocation à financer ses besoins de financements futurs.
Cette solution présente l’avantage pour les fondateurs de ne pas se diluer au capital et de ne pas endetter la société. Elle peut, cependant, avoir l’inconvénient de générer des temps de développements plus longs.
La préparation de votre projet de levée de fonds
Voici un rapide panorama des différentes étapes que vous devez avoir en tête lorsque vous vous posez la question de réaliser une première levée de fonds :
1 – La phase de préparation essentielle
- Concevoir la stratégie de présentation de la société : problème adressé, originalité de la solution, maturité du produit, positionnement distinctif dans son environnement concurrentiel, taille du marché, business model, clients, stratégie de croissance, etc. ;
- Préparer un document de présentation (le « pitch deck ») reprenant formellement la présentation concise du projet. Ce document doit être, à la fois, pédagogique et impactant pour éveiller l’appétit des investisseurs potentiels et les inciter à mobiliser du temps sur l’opportunité.
2 – Une identification précise des besoins
- structurer le business plan du projet qui fera apparaître un besoin de financement et l’affectation de ce besoin (embauches, recherche et développement, marketing/communication, etc.), éventuellement avec l’aide d’un expert-comptable ;
- établir une stratégie pour couvrir ce besoin de financement, en particulier les quotes-parts de financements dilutifs et non-dilutifs (voir ci-dessus) ;
- pour le financement dilutif,
- réfléchir à la valorisation cible de la société, en se basant sur les pratiques de marché pour des opérations comparables, faisant ressortir un niveau de dilution raisonnable post-opération
- identifier les investisseurs les plus adaptés (fonds d’amorçage, business angels, etc.), en s’assurant que le projet est compatible avec leur stratégie d’investissement (en particulier taille du montant levé et secteur d’activité), et que leur profil est en ligne avec les attentes et ambitions des fondateurs, notamment en termes de poids des investisseurs dans les décisions stratégiques, capacité à participer aux levées de fonds futures, etc.
La dimension juridique de votre levée de fonds
Sur le plan juridique, plusieurs points méritent d’être analysés en détail dans le cadre de la préparation et de l’exécution d’une première levée de fonds. Compte tenu de la spécificité de ces thèmes, il est important que vous soyez accompagné dans l’opération par un professionnel spécialisé en fusions-acquisitions ou en droit des sociétés. En voici les grandes lignes, dans l’hypothèse d’un financement dilutif :
1 – Lettre d’intention / « Term Sheet »
A l’issue de la phase d’échanges et de questions/réponses avec les investisseurs potentiels, l’objectif sera de recevoir et de négocier une lettre d’intention (ou « Term Sheet ») formalisant les termes et conditions de l’investissement.
Ce document encadre, par exemple, la valorisation de la société, les instruments juridiques utilisés (émission d’actions ordinaires, d’actions préférentielles, d’actions avec bons de souscription d’actions, d’obligations convertibles en actions, etc.), la gouvernance souhaitée de l’entreprise (par exemple, la représentation d’un investisseur au Conseil d’Administration ou de Surveillance), ou encore les droits des investisseurs (par exemple, accès à l’information régulière sur l’activité, mécanisme de sortie future), etc.
2 – « Due diligence »
Au cours de cette étape, les investisseurs (et/ou leurs avocats, auditeurs) vont analyser en détail la comptabilité et les finances de l’entreprise (analyse des comptes, de la trésorerie, de la structure de sa dette, etc.), les aspects juridiques et fiscaux (droit des sociétés, contrats clients/fournisseurs, propriété intellectuelle, litiges en cours, etc.), les aspects opérationnels (structure des équipes, partage des rôles, etc.), et tout autre aspect important pour la société et susceptible d’avoir un impact sur sa valorisation.
3 – Documentation juridique finale
- dans le cadre de la finalisation de la transaction (closing), la dernière étape est la tenue d’une assemblée générale extraordinaire de la société qui approuve la levée de fonds et décide de modifier en conséquence les statuts de la société, la signature par les investisseurs de bulletins de souscription des actions nouvelles et, bien sûr, le versement des fonds correspondant à leurs souscriptions ;
- bien que non obligatoire, il est d’usage de négocier puis mettre en place au closing de l’opération un pacte d’actionnaires. Il permet de clarifier, sur le plan juridique et organisationnel, les relations entre les parties prenantes ;
- à l’issue de tout ce processus, il conviendra de procéder aux formalités de publicité obligatoires et de déposer les documents juridiques relatifs à l’opération au Centre de Formalités des Entreprises (PV d’AG enregistré aux impôts, attestation de dépôt de fonds émise par la banque qui a réceptionné les fonds, statuts modifiés et copie du journal dans lequel est publié l’avis d’augmentation ou une attestation d’annonce légale).
En conclusion, la première levée de fonds est une étape clé dans la vie d’une startup. Il faut bien la préparer pour maximiser ses chances de succès et optimiser les conditions de sa réalisation, ainsi que d’être bien accompagné pour en sécuriser l’exécution.
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